vendredi 20 février 2009

Chère Université, tu es finie.

"Chère Université,

Tu es finie. Et nous en avons fini. A partir de maintenant tu seras de plus en plus un prestataire de services, fonctionnant selon une logique mercantile, utilitariste, instrumentale, gérée selon des critères de productivité typiques d'une entreprise. Tu seras encore moins démocratique dans ton fonctionnement, encore plus fermée à l'inclusion des étudiants des couches sociales les moins favorisées, et encore plus bureaucratique. Tu te définiras toujours plus comme quelque chose qui n'est pas un service public, tu seras de plus en plus hostile à la pensée critique et à la créativité et, en dernière instance, tu finiras par haïr la propre idée de science, substituée par l'instrumentalisation technique à courte vue, au service de l'immédiateté, fluctuant au gré de la "demande" entrepreneuriale, des commandes gouvernementales et de la démagogie de l'offre immédiate de débouchés professionnels (qui donneront des personnes au chômage 5 années plus tard, quand leurs skills spécialisés mourront sur le marché avec leurs produits respectifs...). Ce n'est pas étonnant que ceux qui vont bien s'entendre avec toi sont un certain type de gestion et d'économie, et un certain type de sociologie. Tu es finie. Maintenant tu es autre chose, qu'ils te nomment d'une autre façon, bordel, je sais pas, direction-générale des politiques publiques et des potentiels secrétaires d'état de gouvernements socialistes, ou Société Anonyme (ou anomique ?). Tu es finie. Tu t'es éteinte avec Bologne et avec le nouveau Régime Juridique de l'Enseignement Supérieur, avec les Fondations, et, dans la recherche, avec le triomphe de la culture de l'audit. Tu seras certainement encore plus éteinte avec le nouveau Statut de la Carrière d'Enseignant de l'Enseignement Supérieur. Tu es finie, ça y est. Point.

En ce qui me concerne, tu sais, je vais continuer à donner mon maximum et mon meilleur dans mon travail avec mes étudiants, en cours et dans les orientations; je vais faire mes recherches de manière encore plus autonome et la moins financée possible; et c'est clair que je vais me joindre à des initiatives - le plus autonomes possibles, le plus possible hors de tes murs. Là, je ne perdrai pas mon enthousiasme, parce que j'aime ça, c'est comme écrire, peindre, flirter. Mais entre tes murs, maintenant d'entreprise, je ferai le minimum exigé par ma situation de salarié. C'est fini le volontariat, l'esprit associatif, coopératif, de service, de participation. Si c'est une entreprise que tu veux être, je me comporterai comme un salarié - et je n'ai aucune inclination particulière pour la "culture d'entreprise", pour l'esprit de corps, pour des bêtises comme les camps de vacances pour les employés. Ou pour le blah blah de palais ou les machismes de la carrière et du petit pouvoir. C'est terminé. Tu es finie. Nous en avons fini. Ici se séparent nos chemins. Tous mes voeux de grands bénéfices et de succès carriéristes.

Avec mes sentiments les meilleurs..."

Par Miguel Vale de Almeida

Traduit librement par Jorge, tiré de Jugular

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